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« Moon Essence » et « Donkey Farm » : deux amis d’enfance, des … – L’Orient-Le Jour


Deux fois par mois, « L’Orient-Le Jour » se propose de raconter les récits d’entreprises libanaises qui prennent des risques et parviennent parfois à obtenir des résultats, en dépit de la crise. Le huitième épisode, aujourd’hui, revient sur le partenariat récent entre un élevage d’ânes et un atelier artisanal pour créer un savon au lait d”ânesse 100 % local.

Il est dit que Cléopâtre se baignait chaque jour dans du lait d’ânesse afin de préserver la jeunesse de sa peau. Un produit qui, deux mille ans plus tard, semble toujours convoité par les Libanaises, ce qui a amené deux amis d’enfance à allier les forces de leurs entreprises pour réaliser un partenariat commercial, récent certes, mais prometteur et 100 % local.

D’un côté, « Moon Essence » est une petite société fondée en 2019 par Sereen Bou Zein Eldeen, ingénieure agricole de 39 ans. De l’autre, « Donkey Farm », un élevage d’ânes à Maasser el-Chouf, géré depuis la même année par Chebli Abou Assi, du même âge. Et pour cause, puisque les deux entrepreneurs partageaient les mêmes bancs d’école.

Plus de deux décennies plus tard, au cours desquelles leurs chemins se sont séparés, Sereen Bou Zein Eldeen a tout de suite pensé à son ancien camarade de classe pour réaliser des savons artisanaux à partir de lait d’ânesse, lui qui élève dans sa ferme 10 ânesses et 4 ânes. « Le concept de Moon Essence est de proposer des produits naturels et sans produits chimiques. Alors quand j’ai voulu un fournisseur de lait d’ânesse, il me fallait quelqu’un de confiance. Je me suis naturellement tournée vers Chebli », raconte-t-elle.

Sereen Bou Zein Eldeen, en pleine préparation de ses savons artisanaux. Photo Mohammed Yassine

Chebli Abou Assi, lui, a initialement fondé sa ferme dans une logique d’agrotourisme. Rencontré sur sa terre, il explique l’avoir ouverte aux visiteurs pour qu’ils puissent y passer un séjour atypique, vivant « de la même façon que lui quand il était enfant ». Les activités de la journée consistent ainsi en une cueillette de fruits et légumes du jardin, la création de sirops naturels et le soin des animaux. En plus de ses ânes, il s’occupe en effet d’oies, de poules, de chèvres et de lapins.

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Le tournant

Séparés de plusieurs milliers de kilomètres après le lycée, chacun partant étudier et travailler à l’étranger un temps, les deux camarades reviennent finalement tous deux au bercail dans les années 2010. Sereen Bou Zein Eldeen travaille alors comme consultante dans une ONG et Chebli Abou Assi en tant qu’ingénieur agricole dans une ferme.

Sans le savoir, en 2019, alors même que le Liban plonge dans la crise, leurs itinéraires professionnels prennent un chemin similaire. Et le contexte économique ne les fait pas reculer. L’entrepreneure assure ainsi « avoir voulu transformer ce désastre en opportunité ». Chebli Abou Assi, lui, explique simplement que cette ferme était son « rêve » et qu’il avait « trop hâte pour ne pas se lancer ».

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Quittant son travail, ce dernier investit 40 000 dollars sur deux ans pour son nouveau projet : « Donkey Farm ». L’objectif ? Créer une ferme autosuffisante : l’eau, par exemple, est récoltée l’hiver via une piscine installée sur le toit de sa maison et suffit aux animaux et à son potager toute l’année. Pour l’aider dans cette entreprise, trois employés travaillent à plein temps et sept saisonniers viennent en renfort l’été.

De son côté, Sereen Bou Zein Eldeen et sa famille ont, eux, investi 20 000 dollars pour transformer le rez-de-chaussée de leur maison en atelier pouvant accueillir les machines nécessaires à la production de leurs créations. Des machines qui lui ont été fournies dans le cadre d’un projet sur la participation économique des femmes, lancé en 2019 et financé par le gouvernement canadien en partenariat avec le programme des Nations unies pour le développement (PNUD) au Liban. « Un tournant pour mon entreprise », souligne-t-elle.

Les savons au lait d’ânesse de « Moon Essence ». Photo Mohammed Yassine

C’est lors d’événements commerciaux où elle se rendait pour présenter sa marque « Moon Essence » et mettre en avant ses produits que Sereen Bou Zein Elden réalise l’intérêt porté par sa clientèle au lait d’ânesse. « Beaucoup de femmes venaient à mon stand pour me demander si mes savons en contenaient », explique-t-elle. L’idée d’une collaboration entre « Moon Essence » et « Donkey Farm » est née.

Un démarrage prometteur

Dans un village près de Aley, à une quarantaine de kilomètres de la ferme de Chebli Abou Assi, Sereen Bou Zein Elden verse ses préparations de savons dans des moules colorés en forme de fleurs. Elle n’a pas d’employés. Seule sa famille met la main à la pâte : Sereen Bou Zein Elden fabrique les savons et gère les réseaux, son frère et ses sœurs l’aident pour le marketing, sa mère réalise des pâtisseries sur demande des clients et son père s’occupe des plantes du jardin utilisées dans les préparations.

Quand elle a démarré, l’entrepreneure vendait en ligne de la « mouneh » et des pâtisseries, avant de se tourner vers les savons artisanaux à base d’huile d’olive. Ce sont désormais ses savons au lait d’ânesse qui déterminent sa marque de fabrique. Fin mai, Sereen Bou Zein Elden a ainsi réalisé son premier lot de 12 savons. En un mois, 10 ont été vendus malgré le prix plutôt élevé : la pièce coûte 8 dollars. Un tarif compris de ses clients : « Ils savent que c’est un savon avec de très bonnes propriétés pour la peau et mes produits sont 100 % naturels », explique-t-elle.

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Une base naturelle et assez rare. « Il faut que l’ânesse accouche et que le bébé ne soit plus à ses côtés » pour la traire, explique Chebli Abou Assi. En tout, l’éleveur peut espérer un litre par jour maximum grâce à ses 10 ânesses, qu’il ne trayait d’ailleurs pas avant ce partenariat. « Je l’avais fait quelques fois pour aider un enfant du village qui avait des problèmes aux poumons », se rappelle-t-il. Riche en vitamines A, B et C, le lait d’ânesse est connu pour renforcer les défenses immunitaires et aider le corps à lutter contre les infections bronchiques.

Chebli Abou Assi a lancé son projet de ferme autosuffisante en 2019. Photo Manon Mendret

Chebli Abou Assi vend son lait d’ânesse 10 dollars le litre. Un prix d’ami, pour sa seule cliente, car ce produit peut coûter jusqu’à 50 dollars sur le marché, et qui pourra être revu à la hausse si « Moon Essence » rencontre le succès. Déjà sur la pente montante, l’entreprise commence à faire un peu de profit, mais elle n’est pas encore tout à fait rentable, admet Sereen Bou Zein Elden, sans entrer toutefois dans le détail des chiffres.

Même constat du côté de « Donkey Farm » qui, après quelques années sans rentabilité (crise et pandémie obligent), voit une amélioration cette année grâce au retour des touristes et aux paiements effectués en dollars, explique Chebli Abou Assi. « Je suis très optimiste pour la suite. J’espère que la situation du pays s’améliorera pour que “Moon Essence” puisse continuer de grandir », conclut Sereen Bou Zein Eldeen.

Deux fois par mois, « L’Orient-Le Jour » se propose de raconter les récits d’entreprises libanaises qui prennent des risques et parviennent parfois à obtenir des résultats, en dépit de la crise. Le huitième épisode, aujourd’hui, revient sur le partenariat récent entre un élevage d’ânes et un atelier artisanal pour créer un savon au lait d’ânesse 100 % local.Il est dit…





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Theo Lefevre

Dans le vaste océan du cyberespace, je suis Théo Lefèvre, un Journaliste Web captivé par les histoires qui se tissent à travers les fils numériques. Mon parcours à l'Université Américaine de Paris a façonné ma plume, tandis que mes curiosités se dévoilent à travers la science et la technologie, le monde des affaires, et l'athlétisme. Porté par mon passé de passionné de sport et d'économie, chaque article que je compose est un reflet transparent de mon engagement envers l'authenticité. Joignez-vous à moi pour explorer les méandres de l'innovation scientifique, les intrications du monde des affaires et les défis du terrain d'athlétisme, tout en partageant un voyage honnête et stimulant à travers mes écrits.

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