Pouvez-vous nous en dire plus sur votre projet de théâtre itinérant ?
« Nous sommes une jeune compagnie basée à Lyon. On a commencé ce projet d’itinérance il y a une dizaine d’années. L’idée est de partir huit jours et de faire une huit étapes que l’on peut relier à pied. Chaque matin, on mène des interviews avec des personnes dans la rue. On échange sur leur manière de voir la réalité, leur environnement, leur imaginaire. On prend le temps de la réflexion, et de se poser. On accepte aussi les temps de silence. »
Et ensuite ?
« Ensuite, on marche quinze à vingt kilomètres. Ce temps de marche nous permet de digérer les interviews et d’en tirer un fil narratif. On a deux formats de spectacle. Le premier est une forme de portrait inspiré de l’interview menée le matin. Le second s’inspire de la découverte du territoire, du paysage, de l’actualité, avec laquelle on invente une histoire fictionnelle chaque jour. On essaye de faire exister une pluralité de points de vue et de présentation des territoires. »
Comment les habitants ont connaissance de votre arrivée ?
« On constitue le public une demi-heure avant de jouer. On demande aux terrasses café si on peut emprunter quelques chaises. C’est un spectacle vraiment spontané, éphémère, réel. Pendant ces temps d’assemblée, on explique la démarche et on invite les gens à prendre la parole. Les gens sont assez ravis des réalités évoquées sur l’espace public. Des gens disent ne pas avoir d’imaginaire, mais c’est faux. En discutant avec eux, l’imaginaire, c’est juste avoir une pensée un peu différente dans son quotidien. »
« En tant qu’artistes, il fallait que l’on soit à un endroit de croisement, de réception »
Quelle est la philosophie de votre projet ?
« On parle souvent de démantèlement de la société. On a l’impression de moins se connaître. On s’est dit qu’en tant qu’artistes, il fallait que l’on soit à un endroit de croisement, de réception. Lors des interviews, on suspend au maximum notre raisonnement. C’était aussi un moyen pour nous de mieux connaître le pays. Le soir, on ne sait jamais où l’on dort, on fait état de ça après le spectacle, et on est généralement hébergé par quelqu’un. Il n’y a pas de chapeau à la fin du spectacle, et on le revendique. On essaye de trouver des petites subventions, sans marcher sur les plates-bandes de nos collègues qui sont localement implantés. »
Pourquoi avoir choisi de traverser le Jura ?
« On n’avait clairement pas fini [de parcourir] la région Auvergne-Rhône-Alpes. Mais on était curieux d’aller voir ailleurs comment ce projet pouvait être réceptionné. On a programmé l’itinéraire en regardant la démographie, le bassin d’emploi. On a essayé d’avoir huit étapes différentes : une grande ville, une cité pavillonnaire, un petit hameau, un site touristique ou patrimonial, etc. »
17 août : Beaufort-Orbagna. 18 : Saint-Amour. 19 : Arinthod. 20 : Moirans-en-Montagne. 21 : Grande-Rivière Château. 22 : Morez. 23 : Menétrux-en-Joux. 24 : Lons-le-Saunier.
