XV du Charbon, Marcellus Steyn, menace fantôme… Ovale Masqué décape France – Écosse | Actu Rugby – actu.fr

Une semaine après le grand retour de la défaite encourageante à Murrayfield, les Français retrouvent les Ecossais sur leurs terres. Pour ne pas trop dépayser nos hôtes, le match a lieu à Saint-Etienne, sorte d’équivalent français de la ville de Glasgow, qui pourrait être un lieu de tournage idéal pour Trainspotting 3.
Mais cette fois-ci, pas de seconds couteaux au casting : le XV de France sort enfin son Equipe Premium © , même si Fabien Galthié commence doucement à renier ce terme, s’étant rendu compte que ce n’était peut-être pas génial de classer ses joueurs comme des formules d’abonnement à Basic Fit.
En parlant de ça, il fallait s’attendre à voir une équipe un peu à court de forme, le fitness gourou Thibault Giroud ayant mis à mal les corps bleus pour leur permettre d’atteindre leur pic de forme en septembre. Mais pas d’excuse : on est en prime time sur TF1 à un mois du début de la Coupe du monde, pas question de perdre une deuxième fois contre un pays qui a une densité de population inférieure à celle de l’île de Ré.

La compo

Le film du match
Alors que l’on s’attendait à ce qu’ils fassent tourner pour que l’on puisse découvrir des joueurs inconnus avec des noms rigolos comme Fergus McTavish, flanker de l’équipe réserve d’Édimbourg, les Écossais sont finalement venus avec une quasi-équipe type. Et avec des intentions. Dès les premières secondes, les hommes de Jamie Ritchie envoient du rythme et nous offrent leur spécialité : des lancements de jeu excentriques avec des trucs comme des redoublées et des longues passes sautées sur les extérieurs.
Les Français, une fois n’est pas coutume, sont beaucoup plus lents au démarrage. A l’image d’un Thomas Ramos qui nous offre une « Damien Traille 2007 » en se laissant piéger par un rebond tellement fourbe qu’il pourrait être nommé ministre de l’intérieur au prochain remaniement.

Décidément bien ambitieux, les Scots tapent une pénalité en touche dans les 22m, et après un bon ballon porté, Steyn est servi en bout de ligne pour l’essai.

0-7, Les Français sont un peu vexés par ce manque d’éducation des Écossais : « On est sympas, on vous invite à la maison et vous, vous prenez la dernière bière dans le frigo, vous vous mettez en slip et vous commencez à jouer de la cornemuse dans le salon ! ».
Ramos réduit le score dans la foulée, mais les visiteurs restent dominateurs, presque à domicile dans le Forez, à tel point qu’on pourrait les renommer XV du Charbon. Les Bleus tentent de répondre de façon brouillonne, à l’image de Penaud qui signe la plus grande course en travers de l’histoire.

Mais petit à petit, la France revient dans la partie grâce à l’un de ses meilleur atouts : le grattage. Que ce soit dans les tribunes VIP ou sur les terrains, cela reste incontestablement le point fort de notre rugby. Marchand, Alldritt, Danty ou Villière freinent régulièrement les avancées écossaises avec leurs grosses paluches.
Sur un ballon récupéré par l’ailier casqué, les Bleus pensent marquer : Dupont joue vite la pénalité, puis Flament perce plein champ. Par une mystérieuse téléportation dont il a le secret, le capitaine des Bleus se retrouve à la conclusion d’un essai qu’il a initié. Hélas, celui-ci sera refusé pour un pied en touche aussi imaginaire que l’ami noir de Bastien Chalureau.

Deuxième arme fatale des Bleus sur ce match, la mêlée. La première ligne toulousaine prend clairement le dessus sur son homologue, et c’est après une épreuve de force qu’intervient le premier essai bleu : Dupont est encore à la manœuvre, et Fickou est en leurre, en menace fantôme, qui rôde dans les parages mais n’intervient jamais (un peu comme lorsqu’il joue sous le maillot du Racing).
Ntamack en profite pour sortir de sa sieste, prendre l’intervalle et marquer. Quel luxe d’avoir un tel joueur, capable de se faire oublier et de sortir de sa boîte au meilleur moment ! Qu’est-ce qu’on ferait sans lui…

13-10 à la pause pour les Français, qui ont laissé passer l’orage sans paniquer, contrairement à moi quand j’allume TF1 beaucoup trop tôt et que je tombe sur C Canteloup. De retour sur la pelouse, les Tricolores semblent même bien décidés à plier le match, sous l’impulsion d’Antoine « pas le temps de niaiser » Dupont.
Après un ballon échappé par Schoeman, le « Kylian Mbappé du rugby » (on sent qu’il faut éduquer le spectateur novice sur TF1) touche le ballon environ 6 fois avant de servir parfaitement Penaud, qui n’a plus qu’à sortir son raffut pour inscrire le deuxième essai français, 20-10.

Quasiment sur le renvoi qui suit, les mangeurs de grenouilles remettent ça. Dupont sert Ramos, qui se dit « c’est bon, 10 points d’avance, Fabien va me laisser le droit de jouer une relance ». L’arrière fusille Ali Leader Price et réalise une passe de 10 mètres pour trouver Charles Ollivon à son intérieur. Le flanker dépose Russell et s’en va marquer le 13e essai de sa carrière. Notez qu’il n’est plus qu’à un essai du total d’Olivier Magne…

27-10, la victoire semble être dans la poche, lorsqu’un évènement va venir ternir la copie bleue. Touché après une tentative de plaquage sur Finn Russell, Ntamack doit céder sa place. À son visage toujours impassible lorsqu’il quitte le terrain, on se doute bien qu’il s’agit d’une petite alerte de rien de tout ! Mais mieux vaut ne prendre aucun risque…
Le grand jeu des chaises musicales débute alors : Ramos passe en 10, Bielle-Biarrey rentre à l’arrière et, n’ayant toujours pas réalisé qu’il y a en réalité deux frères Boudehent, Fabien Galthié décide de déplacer Paul au centre, ce qui nous rappelle les pires heures de Sam Burgess avec le XV de la Rose. Macalou entre à l’aile et, bizarrement, ça semble être le coaching le plus cohérent de l’ensemble.
Un peu plus tard, c’est Antoine Dupont qui est remplacé. Dès la 63e minute de jeu, comme un vulgaire humain. On a ensuite l’impression de voir des enfants quand le seul adulte de la pièce s’éclipse : ça commence à se rentrer des crayons dans le nez, à mettre les doigts dans les prises et à sauter à pieds joints sur le chat.

Logiquement, les Écossais profitent de la désorganisation des Bleus pour revenir dans le match. Huw Jones transperce la défense, puis en coin, Van der Merwe va marquer. Après une pénalité vite jouée par un Finn Russell #dansunbonjour, c’est Rory Darge qui passe la ligne en force.
L’occasion de fermer la boutique sur une énième fulgurance sortie de nulle part se présente à nouveau… mais Gabin Villière refuse d’offrir un essai international à Maxime Lucu, probablement parce qu’il veut être le seul chauve à avoir le droit de pénétrer dans l’en-but.

Un pêché de gourmandise qui aurait pu se payer cher, puisque les mangeurs de haggis inscrivent un quatrième essai après une subtile passe au pied de Horne pour Marcellus Steyn.

27-27 et 5 minutes à jouer, on ne va quand même pas connaître une deuxième Brunelade en deux semaines ? Heureusement, non. Sur une mêlée, Uini Atonio domine son vis-à-vis et obtient une pénalité, ainsi que le statut de seul remplaçant ayant un quelconque impact sur le déroulé du match. Ramos se charge de la pénalité de la gagne et la transforme. 30-27, le XV de France reste invaincu à domicile sous l’ère Fabien Galthié, si on ne compte pas cette malheureuse défaite contre Brice Dulin en 2021.

Les joueurs
Dorian Aldegheri est une sorte de Jean-Baptiste Poux moderne : son bandeau a plus de charisme que lui (et en plus, il n’en porte pas) mais quand on fait appel à lui, on se rend compte que ça tient quand même bien la route. Le Toulousain a martyrisé Schoeman, comme pour lui rappeler cette règle de vie essentielle : un pilier n’a pas le droit d’avoir les cheveux longs, même sales.
En troisième ligne, performance de grande classe pour Charles Ollivon, qui malheureusement poussera de nombreux journalistes à continuer d’utiliser l’horripilante expression « Le Grand Charles ». À son avantage la semaine dernière à Murrayfield, Pierre Boudehent s’est montré plus fébrile, notamment quand il a fallu attraper le ballon, geste il est vrai assez peu travaillé dans son club. Gregory Alldritt est ressorti sans cocard, signe d’un match propre, mais assez terne.
Quand Couillou et Serin donnent l’impression de s’appliquer pendant 4h pour dessiner une maison, un soleil et trois bonhommes, Antoine Dupont débarque et peint la fresque de la Chapelle Sixtine en 10 minutes. Et le pire, c’est que c’était son match de reprise et qu’il n’était probablement pas super en forme. Maxime Lucu, lui, évolue dans un autre registre, voire sur une autre planète, à mi-chemin entre le pom pom boy et le GO du Club Med : il est là pour mettre l’ambiance et célébrer à la place de ses coéquipiers quand ils réussissent de belles actions. Et si Maxime Lucu et ses expressions faciales flippantes constituaient la réponse idéale au haka le 8 septembre prochain ?

Les images du match








La conclusion
Que retenir de ce match, si ce n’est qu’après l’hommage national rendu à Jacques Brunel à Murrayfield, on a retrouvé les vrais Bleus de Fabien Galthié. Ceux qui même quand ils se font sévèrement secouer, même quand ils n’ont que 10% de possession, réussissent toujours à marquer quatre essais assassins sans même transpirer. Au final, les 20 dernières minutes sponsorisées par mesdepanneurs.fr (comme le podcast de la Boucherie Ovalie) resteront anecdotiques.
Hélas, le vrai fait marquant de ce match est la terrible blessure de notre Grandisse Romain Ntamack, qui a dû déclarer forfait pour le Mondial (pour Cyril Baille ça devait aller, heureusement que la compétition dure 4 mois).

Pour une fois qu’un sélectionneur avait réussi à maintenir une charnière pendant plus de 3 matchs consécutifs, les Dieux du rugby nous rappellent à notre condition de simples Français, incapables de débuter un tournoi international avec un minimum de certitudes.
Une blessure qui plonge également dans l’effroi toute une profession, puisque l’habituel marronnier « Ntamack ou Jalibert ?? » disparaît en même temps que la soyeuse chevelure du héros de la dernière finale du Top 14. Pour les journalistes, il va donc falloir se renouveler, sortir de sa zone de confort et peut-être tenter des choses nouvelles, comme analyser le jeu des Bleus.
Ou alors, lancer un débat « Jalibert ou Hastoy… ou Ramos ? ».
Ouais, c’est pas mal ça !
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